LES ETAPES D'UN DESSIN

LE CRAYONNÉ

La première étape consiste à me mettre dans un état de transe absolue pour rechercher dans ma tête tous les petits bonhommes qui y vivent, et Dieu sait s'ils sont nombreux. Je les appelle, les hèle et leur propose sournoisement de boire l'apéro pour les forcer à se coucher ensuite sur ma feuille de papier. Un papier ordinaire, tout ce qu'il y a de plus ordinaire, A3 ou A4 sorti tout bonnement de mon imprimante. Je n'utilise que rarement du vrai papier à dessin conçu pour les vrais artistes (entendez par là ceux qui sont subventionnés ou dont les parents financent les études) !

J'ai une idée assez construite de la scène, mais sans plus. Je dépose un personnage, puis un autre tout en rigolant bêtement dans ma tête en imaginant la scène qui va suivre. Mes idées apparaissent au fur et à mesure que mes traits de crayon envahissent la feuille. Je tremble, éructe des mots magiques, je bave tel un loup-garou à minuit (notez bien que je ne parle pas du chanteur canadien), transpire à grosses gouttes alors que la prunelle de mes yeux roule comme des billes jusqu'à ce que le crayonné prenne fin.

Parfois il faut du temps et de l'espace entre les temps selon la complexité du dessin. Deux cent trente-cinq cafés sont parfois nécessaires pour tenir le choc. Jamais d'alcool ni de tabac ou de drogue. Je ne suis pas ce genre d'auteur qui a besoin de souffrir pour créer. Je préfère la joie et la rigolade. Cette étape est sans doute la plus longue car de nombreux coups de gomme sont souvent nécessaires pour dessiner un nez plus gros et plus rigolo à un personnage ou changer de place un chien errant dans la feuille. 

Tel un funambule, je cherche l'équilibre dans la composition et un des critères les plus importants demeure la lisibilité de la lecture du dessin.

L'ENCRAGE

Vient ensuite la mise à l'encre (avec un E), comme confondent les marins qui n'ont aucun sens de l'orthographe et les pieuvres dont c'est tellement le cadet de leurs soucis qu'elles la crachent honteusement dans la mer au mépris de toutes les règles écologiques. J'utilise pour cela un pinceau en poil de martre, petit animal extrêmement mignon que l'on électrocute pour lui arracher son système pileux (authentique) trempé dans l'encre de Chine de la banlieue Sud de Shanghai, ou un feutre banal, tellement banal que je n'en parlerai même pas tellement il se vautre dans la banalité sans aucun remords ni honte.

Cette étape consiste à repasser plus ou moins fidèlement les traits de crayon, ajoutant quelques gags de-ci de-là histoire de ne pas accomplir une tâche ingrate et répétitive. Après séchage de l'encrage (avec le sèche-cheveux d'un de mes amis Yéti), je gomme le crayonné énergiquement ce qui remue parfois dangereusement ma table, et mon café posé dessus qui parfois se précipite sur le sol comme s'il voulait imiter les derniers jours de Mike Brant. 

LA MISE EN COULEUR

Pour la couleur, j'utilise plusieurs médiums : l'aquarelle, les encres aquarelles Colorex ou le logiciel Photoshop, que je dois être un des rares à avoir acheté. Pour les incultes, un médium n'est pas seulement quelqu'un qui se connecte à l'au-delà, mais également une matière ou un outil utilisé pour créer. Le graphite ou le fusain sont des médiums, alors que le tractopelle non ! Car on dessine rarement avec ce genre d'engin, sauf si on est une brute épaisse et qu'on dispose d'une grande surface pour gribouiller des trucs !

COMMENTAIRES

Bravo Christophe... je retrouve avec plaisir ton humour dont tu as l'exclusivité totale. Par contre je lis que tu utilises la gomme! ! Je comprends pas. Tu m'as demandé de jeter toutes les miennes, ce que je n'ai pas fait alors je les reprends. Je vois que ça fait de belles choses. biz

Dominique

Mon pov'vieux, tu radotes de plus en plus ! Presqu'autant, Lara, qu'un vieux musichien nommé (c'est bien sa seule nomination) : Maître Pianisse. Continue, j'adooooooore!

Jipé

Bonsoir, Je me suis bien régalée, j'ai découvert les dessins au fur et à mesure. Ce qui m'a le plus frappée, c'est comment à partir du même dessin on passe d'une impression de profusion où on s'accroche pour décrypter les gags, à plus de clarté avec les traits passés à l'encre, pour arriver à une lecture évidente avec l'apparition des couleurs, chaque étape ayant son charme. Ça m'a fait penser au montage cinéma, si on regarde des images sans son, on se fait une histoire dans sa tête, puis on mixe avec une musique, et l'histoire devient différente, et ce qui est le plus étonnant, c'est que si on change de musique et de rythme, l'histoire change à nouveau alors qu'à la base les images sont les mêmes... c'est sûrement pour ça qu'on parle d'illustration sonore +:) !

Merci pour ce partage, 

Sophie

J’adore vos dessins. Je profite de ce confinement pour enfin me mettre au dessin type cartoon. Vos explications en vidéo sont vraiment très bien faites et toujours avec une touche d’humour ;-) vraiment très sympa. Je me suis bien entraînée avec le visage triangulaire et rond je continue les autres visages.

Amélie

Le huitième jour, Dieu fit l'inventaire des dons qu'il lui restait à distribuer… et il créa Delvallé !

Jean-Serge

Vos commentaires sont les bienvenus. Cependant, je n'ai pas trop envie de passer du temps à modérer les écrits de certains petits malins qui se croient malins. Facebook et les autres réseaux sociaux regorgent de LOL, MDR, PTDR, « Je sui dacort avec vou », ou des insultes. Par contre, je publierai avec plaisir tous les autres commentaires. Ma tribune vous est donc ouverte. Ecrivez-moi vos impressions via le formulaire ci-contre et je les publierai en bas de page.